Douglas Kennedy dit, dans son ouvrage  »Quitter le monde », qu’il existe un énorme fossé entre « comprendre » un événement qui bouleverse votre vie et « accepter » sa terrible réalité. Je vois cela très souvent dans le cadre du deuil et la fausse-couche en fait partie. Ce phénomène ne concerne pas la femme seule, il y a le mari, les enfants et même les proches. C’est un deuil qui affecte la vie de toute la famille pour un certain temps et marque son quotidien par la déception, le chagrin et certains sentiments et expressions négatifs qui diffèrent beaucoup selon le stade de la grossesse. Ce phénomène touche près de 15% des grossesses et demeure un fait douloureux sur le plan psychique, et physique bien évidemment. Cependant, un des secrets pour dépasser ce bouleversement est d’arriver à en parler librement, d’autant plus quand vous avez déjà d’autres enfants. L’idée est de ne pas laisser le tabou s’installer.

Pouvoir parler librement de sa fausse-couche: les détails troublants

Le premier sentiment qui touche la femme qui vient de faire une fausse-couche est la culpabilité. Pour essayer de donner un sens à ce qu’elle a vécu, elle va chercher les raisons qui pourraient la rendre responsable: qu’est-ce que j’ai fait de mal? Je savais qu’il fallait que je me repose…; Le couple va ressentir de l’injustice: pourquoi moi et non pas ceux qui désirent ne pas avoir d’enfants?…; La colère va dissimuler une tristesse non exprimée…;  Ceci peut même toucher l’estime de soi : je ne suis même pas capable de faire vivre un enfant…; Puis un peu de soulagement va faire surface, en voyant de nouveaux projets se profiler à l’horizons, des projets qui n’auraient peut-être pas pu se réaliser avec un enfant. Ceci peut vous sembler culpabilisant d’avoir de telles idées, mais c’est pourtant une défense très saine. Autant donc de sentiments qui se mélangent en vous et qui laissent place à un réel mécanisme de deuil à ne pas passer sous silence.

Pouvoir parler librement de sa fausse-couche: la réaction et l’interprétation

Que c’est compliqué aussi de parler de cela en couple ! Le silence du partenaire peut être interprété par désintérêt ou négligence, sans se rendre compte qu’il cherche seulement à jouer le pilier solide de la petite famille, par peur de faire multiplier les maux! Chacun est blessé et peut avoir tendance à mal interpréter la réaction de l’autre. Il faut donc arriver à en parler ensemble, non pas en accusant l’autre, mais en exprimant simplement ce que vous ressentez vous et ce que vous attendez de l’attitude de l’autre. Il faut aussi accepter que nous ne fassions pas tous notre deuil de la même façon. Je vous encourage à aider vos enfants à en parler aussi, voire à faire des dessins pour le petit bébé qui est parti (si vous avez des petits à la maison). Donnez-leur l’image d’un petit ange qui vit maintenant au ciel, en s’adaptant au stade de chacun car les enfants interprètent la mort très différemment selon leur âge.

Pouvoir parler librement de sa fausse-couche: comment faire?

C’est tout d’abord répondre à vos propres besoins, voire aller demander de l’aide à une personne extérieure. C’est normal de ressentir des sentiments ambivalents, de se sentir incompris et parfois seul. Le tout est de ne pas laisser ces sentiments s’installer trop profondément… Ensuite, montrez à votre entourage, vos enfants particulièrement et votre conjoint, que vous êtes prêt à répondre à leurs questions, à en parler avec eux. Enfin, je terminerai en insistant sur le fait que ce bébé qui vous a quitté fait maintenant partie de la famille et même les enfants qui viendront après doivent être au courant qu’ils ont un grand frère ou une grande sœur au ciel. Car les enfants perçoivent tout, même ce qu’on ne leur dit pas !